On vieillit tous, et c’est pas rassurant

Le vieillissement de la population pourrait faire exploser les comptes publics

LE MONDE | 08.06.06 | 15h37
Pierre-Antoine Delhommais et Hélène Foyer
Article paru dans l’édition du 09.06.06





Le vieillissement de la population, avec l’augmentation des dépenses de retraite et de santé qu’il implique, menace-t-il l’économie mondiale d’une déflagration financière ? C’est le sentiment qu’on retire après la lecture d’une étude consacrée à L’Impact du vieillissement de la population sur la qualité de crédit des émetteurs souverains réalisée par l’agence de notation Standard & Poor’s. Publiée mercredi 7 juin, elle s’intéresse au cas de trente-deux pays industrialisés.

Au plan mondial, la population augmente et vieillit en même temps. Selon l’ONU, l’âge moyen de la population sera, en 2050, de 38 ans, dix ans de plus qu’en 2005, et il s’élèvera même à 50 ans au milieu du XXIe siècle dans près de quatorze pays, pour moitié situés en Europe.

En France, l’âge moyen s’inscrira à 45 ans en 2050, contre 39 actuellement. Les plus de 60 ans représenteront 46 % de la population en 2050. Ce chiffre était de 25 % en 2005. La population active, elle, connaîtra une évolution inverse, pour avoisiner 55 %.

Cette évolution démographique pose de graves difficultés économiques et budgétaires. Pour financer des dépenses de plus en plus lourdes, les Etats devront emprunter et s’endetter massivement, au risque de mettre en péril leur solvabilité. « Sans réformes budgétaire et politique concertées, la pression des dépenses de retraites et de santé sur les dépenses publiques et sur la notation de nombreux pays développés ira s’intensifiant au cours des prochaines années, relèvent les experts de l’agence. Pour l’échantillon de pays retenus dans cette étude, le ratio dette/PIB (produit intérieur brut) moyen atteindra 180 % du PIB, contre 33 % en 2005. »

Pour mémoire, la limite fixée en Europe par le pacte de stabilité s’établit à 60 %. Les déficits publics connaîtraient la même évolution catastrophique, selon Standard & Poor’s, leur niveau s’élevant à 4 % jusqu’aux années 2020, avant de s’envoler « inexorablement », pour atteindre environ 6 % en 2030 et 13 % en 2050.

Le dérapage des finances publiques serait très variable d’un pays à l’autre. Les pays scandinaves, mais aussi l’Autriche, le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, bons élèves, parviendraient à contenir la progression de leur dette en deçu de 100 % du PIB en 2050.

« UNE SIMULATION »

A l’inverse, « certains pays d’Europe continentale, comme la France et l’Italie, verraient leur ratio de dette franchir nettement la barre des 200 % ». Si la tendance actuelle se poursuivait, la dette française représenterait 223,4 % du PIB d’ici à 2050. Elle se hisserait même jusqu’à 271,1 %, dans le cas d’une hausse des primes de risques exigées par les investisseurs. Petite consolation, la France ferait mieux que le Japon, dont la dette pourrait grimper jusqu’à 1 100 % du PIB en 2050 !

Dans ces conditions, les emprunts d’Etat verraient leur note abaissée dès le début de la prochaine décennie et deviendraient des junk bonds, obligations pourries, dès 2040.

« Ce scénario ne constitue pas une prédiction, précise l’agence, mais résulte d’une simulation qui met en lumière l’importance des dépenses liées au vieillissement comme facteur de l’évolution de qualité de crédit d’un pays. En réalité, il est peu probable qu’un Etat laisse totalement déraper sa dette et ses déficits publics. »

Pierre-Antoine Delhommais et Hélène Foyer

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