Société : Et si les médias étaient nocifs ? (par Frederick Diot sur tribunelibre.org)

La fin du 20ème siècle est bien l’ère du média. Que ce soit la télévision, la presse, le cinéma, ou tout autres vecteurs de diffusion, tous ont connu une forte progression, une grande modernisation et surtout une évolution du local média au mass-média (autrement dit, de la diffusion à des petits groupes vers l’ensemble des groupes). Cette ascension est si fulgurante, et tellement dans les moeurs, qu’il est impossible de voir précisément les répercutions sur long et moyen terme. Pourtant, un effet sociologique se dégage, il s’agit de la généralisation de l’hyper-réel.

Avant toutes choses, il faut définir l’hyper-réel (Simulacres & Simulation – J. Baudrillard). C’est une sorte de réalité fictive qui précède le réel, et qui finit par se juxtaposer sur ce dernier. Autrement dit c’est une projection virtuelle qui tend à se confondre, à fusionner avec le réel. On parle ici de points de vue individuels, mais leurs sommes finit par créer une bulle sociale hyper-réelle. Pour éviter de pédaler dans l’eau, prenons des exemples concrets. D’abord celui prit par Baudrillard: l’attentat du World Trade Center. On peut résumer la pensée de l’auteur en disant que tout dans les tours jumelles tendaient à les détruire dans l’hyper réel. On a deux constructions humaines arrogantes par leurs tailles et leurs significations, le fantasme de leurs destructions était telle qu’il était déjà fait (comme un enfant construit un château avec énormément de précision pour mieux le détruire). Tout les plus grands monuments sont déjà virtuellement détruit dans l’hyper réel. Deux autres exemples, d’abord, le pape Jean Paul 2 dans ses dernières années de vie. Bien que l’homme n’était pas mort, le réel de l’homme avait déjà fusionné avec l’hyper-réalité de sa mort. C’est a dire que le symbole de ce pape en fin de vie, tendait vers la célébration de sa vie par l’avenue de sa mort. Pourtant sa mort n’était pas réelle, elle n’existait pas, mais elle était déjà virtuellement superposée à la réalité. L’autre exemple est plus intéressant parce qu’il est plus interactif. Il s’agit des jeux de hasard, comme le loto, et ses liens avec la superstition. Si des gens sont persuadés qu’il vont gagner, si d’autres croient des signes qui les mènent à la victoire, c’est parce que pour les personnes les numéros du lotos existent déjà, il sont déjà définit dans l’hyper réel, il ne manque plus qu’a les percevoir. Or c’est faux, les numéros n’existent pas encore, il n’existeront qu’a partir du moment ou ils tomberont dans le panier. Si cette projection va jusqu’à simuler la victoire, et que la réalité corromps la fiction par son existence (c’est dire que la personne a perdu), il n’y a pas de choc étant donné que l’hyper réel est un espace virtuel qui n’a ni début , ni fin, qui ne fait que se superposer à la réalité jusqu’à l’absorber par synchronisation. De façon général, le virtuel finit par si bien précéder le réel, que la différence entre les deux tend vers l’écart le plus petit possible. L’hyper réel est avant tout une mise en scène du réel qui finit par fusionner avec ce dernier. Et si on fait la liste des vecteurs qui pousseraient à cet acte, on trouve immédiatement les médias. Les films, les journaux, les livres tendent à motiver l’esprit à construire la réalité par appréhension, et donc développer cette faculté à absorber la fiction comme réalité. Si elle est de plus en plus forte c’est parce que nous élevons chaque année le niveau par des faits toujours plus marquants, toujours plus oppressants, et surtout toujours plus sur-médiatisés. Est ce que nous sommes capable de vivre dans un monde sur-médiatisé ? Aussi est ce que la généralisation de la télé-réalité, et de la diffusion en continue de tout ces Monsieurs et Madames tout-le-monde (jusqu’à saturation, tapage médiatique), tout ces anonymes sous des projecteurs envenimés de clichés, ne nous pousseraient pas avoir régulièrement des impressions de connaître tout le monde dans son hyper réel ? Tout les journaux parlant de la mort du pape étaient déjà prêt plusieurs mois, voir des années, avant sa mort réelle, une forme de concrétisation de cet espace virtuel. Cette absorption de l’hyper réel dans les médias (beaucoup plus flagrant dans les médias d’actualité puisqu’ils se déclarent comme oeuvres de non-fiction!) engendrent un cercle vicieux. Le réel inspire l’hyper réel, l’hyper-réel inspire le réel. Aussi, la question de la médiatisation de tout les faits reste souvent en suspend. La nocivité se trouve bien évidement dans la confusion du réel et de l’hyper-réel, dans cette bulle virtuelle qui en plus de nous tromper, nous fait évoluer dans un univers décalé et qui tend à s’inspirer d’une fiction toujours plus irréelle.

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